Les groupes familiaux Al-Anon sont nés aux États-Unis en 1951. Arrivés en France en 1962, ils sont composés de bénévoles, qui tous sont ou ont été affectés par cette consommation d’alcool dans leur entourage. Ce sont des parents, des enfants, des épouses, des époux, des compagnons ou compagnes de vie, des sœurs, des frères, d’autres membres de la famille, des amis, qui viennent en aide aux proches de personnes alcooliques en partageant leurs parcours.
Al-Anon œuvre pour améliorer le quotidien des proches de malades, notamment par l’acceptation de l’alcoolisme comme une maladie et par l’encouragement de comportements appropriés à celle-ci. Pour Ouest-France, plusieurs membres de l’association Al-Anon ont accepté de répondre aux questions que vous nous avez posées sur notre page internet Ouest-France vous répond. Nous avons sélectionné dix de leurs réponses. Les voici. Tous leurs prénoms sont empruntés.
1. « Mon conjoint boit une bouteille de whisky par semaine, est-ce de l’alcoolisme ? » demande Laurence, de Couëron (Loire-Atlantique)
Ce n’est pas directement la quantité d’alcool consommée qui définit l’alcoolisme, répond Nadine. Les questions à se poser sont : Suis-je gênée par sa consommation d’alcool ? Le comportement et l’humeur de mon conjoint sont-ils devenus problématiques pour moi ? Est-ce que je ressens de la peur ou de la honte en sa présence ? Y a-t-il des problèmes familiaux liés à cette consommation : isolement, absences, problème au travail, problème d’argent, violences verbales ou physiques ? Si vous répondez oui à l’une seule de ces questions, les réunions Al-Anon vous seront d’une grande aide.
2. « Comment faire pour aider un enfant adulte qui est alcoolique ? Et qui avait un grand-père alcoolique, qui a brisé notre enfance et notre vie entière », questionne Odile, de Cholet (Maine-et-Loire)
Aidez-vous avant tout ! Conseille Denise. Comme beaucoup, j’ai eu la prétention d’être en mesure d’aider l’alcoolique, mais sans succès. En rejoignant les groupes Al Anon, j’ai rencontré ses membres, des personnes qui connaissent bien le problème puisqu’elles y sont ou ont été elles-mêmes confrontées. J’y ai appris qu’il s’agissait d’une maladie, ce que j’ignorais. J’ai accepté le fait que j’étais impuissante, comme l’alcoolique devant l’alcool. C’est par les partages, les lectures et le soutien que j’ai trouvé l’attitude à adopter pour moi et auprès de l’alcoolique. J’ai compris que mon malaise provenait de mes attitudes.
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3. « J’ai découvert l’alcoolisme de mon fils récemment et je veux l’aider. Il a divorcé et son ex-épouse et ses enfants sont partis à 600 km. Il a vraiment sombré après leur départ. Je n’ai pas du tout d’infos sur le comportement à adopter en tant que parent aidant », interroge Catherine
Les parents d’enfant poly-dépendant qui vivent ou qui ont vécu ce problème de consommation excessive comprennent comme peut-être bien peu de gens peuvent le faire, répond Claudine qui conseille de rencontrer d’autres personnes dans la même situation. En tout premier lieu, aidez-vous, en comprenant et en acceptant que l’alcoolisme de votre fils soit une maladie, ajoute Odile.
Parler avec des personnes dans votre situation pour vous sentir moins seule. Être assurée qu’il n’est pas responsable de sa maladie mais de son rétablissement et que le groupe des Alcooliques anonymes peut être une solution. Parfois, il est salvateur pour un alcoolique de toucher le fond afin qu’il comprenne la nécessité de se soigner.
4. « J’ai vécu avec une maman alcoolique qui hélas est décédée depuis 8 ans. J’ai toujours ce sentiment de culpabilité, qu’aurai-je pu faire pour éviter cette fin prématurée ? Aurai-je dû me protéger, et fuir comme d’autres membres de ma famille ont fait ? Dois-je également culpabiliser de me dire que, malgré la douleur et la tristesse, le décès de ma maman m’a quelque part soulagée car la situation devenait intenable ? Mes sentiments sont contradictoires et c’est dur de me construire », demande Claire, Le Mans (Sarthe)
Je suis la fille et l’ex-conjointe de malades alcooliques, confie Maryse. J’ai fui la maladie de mon père avec beaucoup de colère, de ressentiment et de jugement envers lui. Je ne l’ai quasiment pas accompagné dans sa fin de vie et j’ai ressenti énormément de culpabilité. À cette époque, je vivais déjà avec mon ex-conjoint, qui peu à peu a développé la même maladie alcoolique. Je ne pouvais ni ne voulais vivre sans lui. J’ai pris contact avec l’association Al-Anon au sein de laquelle j’ai trouvé l’aide et le soutien indéfectibles dont j’avais besoin. J’ai accompagné mon ex-conjoint qui est aujourd’hui décédé dans la maladie. Je ne ressens aucune culpabilité, ni aucune responsabilité vis-à-vis de sa maladie et de son décès. Je suis juste responsable de mon rétablissement et aujourd’hui je suis heureuse.
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5. « Bonjour, sachant qu’il faut passer obligatoirement par une période de sevrage. Pendant cette période, est-il possible de mettre la personne sous tutelle et, si oui, quelles sont les démarches ? Merci », questionne Gilles, de Névez (Finistère)
Une assistante sociale répondrait précisément à la question, répond Denis. Cependant, d’après mon expérience, on ne peut pas mettre une personne sous tutelle en claquant des doigts ! C’est une procédure longue, qui demande en général l’avis d’un expert psychiatre afin de prouver que la personne est vulnérable et n’est pas en capacité de gérer ses finances par exemple, ou sa propre sécurité.
Ensuite, le dossier est examiné par un juge avant qu’une décision soit posée. Alors qu’un sevrage dure en général une semaine, s’il est suivi d’une post-cure, il peut aller jusqu’à huit semaines. Les temporalités ne sont pas les mêmes. Par ailleurs, on peut noter qu’une motivation fréquente évoquée par les patients qui commencent une démarche auprès d’un service d’addictologies est souvent l’argent. On peut se poser la question de l’intérêt ou non d’intervenir pour « protéger » la personne des conséquences financières de sa consommation si finalement cela lui enlève une source de motivation au changement (sauf dans les cas extrêmes de mise en danger avérée, bien entendu).
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6. « Quels sont les déclics pour arrêter de boire et que faire quand la personne alcoolique refuse de l’aide et est toujours dans le déni ? », interroge Dominique, de Saint-Nolff (Morbihan)
J’ai longtemps essayé de trouver des solutions pour que mon compagnon arrête de boire, je lui reprochais son comportement, j’étais souvent dans le ressentiment et épuisée, confie Martine. Lui répondait positivement à certains de mes conseils, mais plus pour me faire plaisir que pour se soigner. Par ailleurs, je ne lui disais pas clairement ce qui n’allait pas dans son comportement, je le protégeais et en oubliais mes besoins de peur que sa maladie s’aggrave.
Et puis, un jour à la fois, j’ai appris à dire les choses qui n’allaient pas en lien avec notre relation (fausses promesses, mensonges, problématiques récurrentes sans prises de décisions, mes besoins, mes envies). Ça a beaucoup amélioré notre relation. Petit à petit, je n’ai plus parlé d’alcool, d’outils du rétablissement avec lui, et je me suis concentrée sur ce qui nous rassemblait. Malheureusement, la maladie s’est aggravée et je l’ai quitté parce que je n’avais plus la force d’être à ses côtés dans ses nombreuses rechutes.
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7. « Je ne sais plus comment aider ma fille âgée de 46 ans. Divorcée, les enfants sont à la garde de mon gendre. Elle est vraiment dans le déni mais mes petits-enfants en souffrent. On est là pour leur faire comprendre que c’est une maladie. Ils ont 11 et 8 ans », demande Ginette, de Saint-Pierre (La Réunion)
Je suppose que le juge des affaires familiales a bien fait son travail en veillant à la protection des enfants s’ils ont été confiés à leur père, répond Marion, membre d’Al-Anon et par ailleurs professionnelle de santé. J’imagine que c’est une source de désespoir supplémentaire pour cette mère, malade alcoolique, séparée de ses enfants. Mais c’est aussi l’occasion de provoquer en elle un éventuel déclic, cela peut l’aider à toucher don fond, pour justement sortir du déni et tout faire pour se soigner. Les enfants en souffrent et on leur demande déjà si jeune de comprendre… Oui, c’est une maladie, mais ils ne sont pas obligés de se suradapter pour protéger leur mère. Ce n’est souhaitable ni pour eux, ni pour elle. L’aider serait de continuer de parler de son problème d’alcool, sans jugement, mais sans complaisance, lui rappeler qu’elle peut s’en sortir si elle demande de l’aide, que des solutions existent : des services de soins et des groupes d’entraide comme les Alcooliques anonymes.
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8. « Comment faire prendre conscience à son mari de la dépendance quotidienne à l’alcool en buvant un quart de vin à chaque repas ? » questionne Annie-France, de Melesse (Ille-et-Vilaine)
C’était mon souhait de faire prendre conscience au buveur excessif, autrement dit dépendant de l’alcool, de sa dépendance, répond Michelle. J’usais alors de diverses petites manipulations, comme d’insister sur l’existence des Alcooliques anonymes, en plaçant ostensiblement des plaquettes ou des informations sur le sujet. J’ai compris que ce n’était pas dans mes capacités et que ma volonté n’avait aucun impact sur ce qui incombe à l’autre, mais qu’en revanche, je pouvais cultiver l’amour de moi-même et de l’autre en acceptant la réalité, en m’occupant de moi, en parlant de mes ressentis, en posant mes limites…
Mon mari a pris conscience de lui-même, il avait sans doute conscience avant moi d’ailleurs de son alcoolisme, mais le mensonge faisait aussi partie de sa maladie à l’époque. Moi, j’ai appris la différence entre tendre la main à l’autre et contrôler l’autre. Aujourd’hui, mon mari a rencontré les Alcooliques anonymes et la sobriété depuis plusieurs années.
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9. « L’alcoolisme est une maladie. Comment se fait-il qu’on parle très peu du conjoint qui subit ? », interroge Myriam, de Locminé (Morbihan)
Le conjoint parle peu du malade de l’alcool, répond Catherine. Personnellement, je préfère en parler aux personnes qui connaissent la même situation. J’ai honte de cette maladie qui me colle à la peau, qui me rend agressive, désagréable et quelquefois méchante. Je me sens coupable parfois et j’ai peur d’être jugée. En parler avec des membres d’Al-Anon m’aide beaucoup pour cela.
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10. « Comment rassurer un parent alcoolique sur le fait que sa maladie ne nous impacte pas autant qu’elle ne le croit ? », demande Alicia, de Romillé (Ille-et-Vilaine)
Je ne cherche pas à rassurer mon père, confie Élodie. J’essaie de vivre ma vie du mieux que je peux en m’occupant de moi, en faisant des choses qui me font plaisir. Je vérifie que mes attentions envers mon père sont pleines de bienveillance, de courtoisie, de gentillesse. J’évite de me laisser aller à lui faire des réflexions désobligeantes. J’essaie d’être aussi honnête que possible. Je ne lui cache pas non plus que je suis inquiète parfois.
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