« On se prend la tête au sein de la famille », « ça tape sur le système », « on pète les plombs »… Rue des Marettes, dans le quartier du Petit Paramé à Saint-Malo, des Malouins n’en peuvent plus d’attendre la fibre optique.
Il faut dire que, chez eux, l’ADSL rame. « Confort des usages : faible », admet d’ailleurs le fournisseur d’accès Orange sur sa carte de couverture Internet haut débit. Pour compléter le tableau, les réseaux mobiles 5G et 4G ne sont pas miraculeux dans le coin, d’après les habitants.
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Négociation permanente dans les familles
Autant dire qu’avec des ados qui voudraient jouer en réseaux, des adultes en télétravail qui auraient besoin de la visioconférence, et sans même parler d’avoir la télévision par Internet, ça coince et pas qu’un peu.
C’est la négociation permanente au sein de la famille pour pouvoir utiliser tel ou tel service connecté ou tout simplement aller sur Internet.
« Tout le quartier a la fibre sauf notre rue »
Solenne et Vincent Guyomard, qui ont fait construire dans la rue et y habitent depuis un an, n’avaient pas anticipé le problème et pour cause :
« On résidait auparavant à quelques centaines de mètres à vol d’oiseau, rue du Mont-Fleury, et on avait la fibre depuis quatre ans », explique Solenne.
Les lotissements derrière et en face l’ont eux aussi. En fait, tout le quartier a la fibre sauf notre rue, c’est ça qui rend fou.
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La galère pour envoyer des fichiers
Pour corser encore la situation, il vient de se mettre à son compte comme maître d’œuvre :
« Notre souci, ce n’est pas de ne pas pouvoir télécharger de séries ! Le manque de débit, pour moi, c’est un enjeu énorme. Mes fichiers d’appels d’offres mettent deux heures à partir, là où ça mettait 20 secondes dans mon bureau d’avant. Les fichiers de géomètre, c’était 30 secondes à deux minutes maximum, là c’est 45 minutes. La semaine dernière, j’ai dû aller travailler chez un collègue quai Duguay-Trouin. »
Ce passionné de football ne s’est pas résolu à résilier Canal+, mais « les matchs, je ne peux les voir que sur mon téléphone et pas ici ! »
Les enfants aussi sont à la peine car ils ont bien entendu besoin d’Internet pour leurs cours et leurs devoirs.
« En fait, le seul avantage que je vois à la situation, c’est qu’ils ne sont pas accros à Fortnite », ironise Solenne Guyomard.
« Ça coupe, ça gueule »
Arnaud Emerssent, chauffeur de taxi, en a marre lui aussi. Il réside avec sa famille depuis sept ans rue des Marettes. « Quand je suis sur mon logiciel pour les factures, ça coupe. Quand les enfants essaient de jouer à des jeux vidéos, ça coupe, ça gueule. On paie comme tout le monde et on n’a pas le service derrière. Je dois être à 150 ou 160 euros en tarif pro avec deux téléphones et la box. »
Quant à Ségolène Cardin, elle a les mêmes déconvenues. Pas la peine d’espérer voir un film « si on n’éteint pas tous les autres appareils ». Plus gênant, son compagnon ne peut pas télétravailler correctement. « S’il y a une réunion, il est obligé d’aller à Rennes. »
Catherine Poulain, quant à elle, vient tout juste de s’installer rue des Marettes et déplore elle aussi le déplorable réseau Internet :
Ce n’est pas juste une question de confort. Par exemple, pouvoir se connecter sur Parcoursup, on nous le demande, ce n’est pas un choix.
« Solution d’urgence »
Elle a vite compris, aussi, que ses grands enfants ne pourraient pas venir télétravailler. « Alors on ne va pas attendre 10 ans. On va faire venir un antenniste pour utiliser Starlink (Internet par satellite, NDLR). On choisit la solution d’urgence, même si ça a un coût. Si jamais la fibre arrive, on doit pouvoir revendre l’antenne. »
C’est Solenne Guyomard, à bout de nerfs, qui a appelé la presse locale. En un an, elle a passé beaucoup de coups de fils, eu de nombreux interlocuteurs différents, pour tenter de savoir quand la rue sera fibrée. Et elle a déjà entendu, comme Arnaud Ermessent, quelques promesses non tenues.
Et quand on me dit que sur l’échelle des urgences, on n’est pas au premier rang à Saint-Malo, ça me met dans un état pas possible.
Comme ses voisins, elle espère ne pas avoir à attendre fin 2025, date à laquelle tout le territoire français, ou presque, est censé être couvert par la fibre optique…
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