ENQUÊTE. « Modes d’emplois ». Le télétravail, les salariés le réclament, les entreprises en profitent (1/5)

Tout laisse à penser que les salariés sont les grands gagnants de la généralisation du télétravail. Pas si sûr… Les déplacements domicile-travail à rallonge sont remplacés par des journées sans fin. Les frais de carburant par l’augmentation des dépenses énergétiques. Côté entreprises, on gagne des mètres-carrés et de la flexibilité, mais on perd parfois de vue l’équilibre de la relation avec l’employé. C’est le premier volet de « Modes d’emplois », une enquête qui déboulonne les idées reçues sur le monde du travail.

Trois chats rôdent dans le salon. Le plus petit, au pelage gris rayé, profite de la baie vitrée entrouverte donnant sur le balcon et l’espace vert de ce lotissement du sud de Rennes. Il cherche à attirer l’attention de son maître, installé sur la grande table à manger en bois. Mais un ordinateur portable accapare toute l’attention d’Ali Mechkouri, consultant en assurance auprès des collectivités territoriales et des administrations publiques, qui télétravaille à plein temps depuis l’automne 2021.

Le petit félin n’a pas dit son dernier mot. Il grimpe sur la chaise voisine, puis près du PC. « Ce matin, j’étais en visio et il voulait passer devant l’écran. Je l’ai repoussé et il m’a mordu. Ça, c’est un point négatif », sourit le cadre de 35 ans qui, pour sa réunion, a troqué son habituelle tenue de travailleur à la maison – un tee-shirt et un jogging – pour une chemise blanche et un jean. D’habitude, pour éviter tout dérangement, il sort sa horde, mais ces aléas du quotidien « sont relativement peu importants par rapport aux bénéfices ».

Salarié depuis dix ans d’une entreprise de Grand-Fougeray (Ille-et-Vilaine), à mi-distance entre Rennes et Nantes, Ali a refusé de revenir au bureau à l’issue de la crise sanitaire du Covid-19. Lui, qui disposait déjà d’un jour de télétravail par semaine depuis plusieurs années, n’envisageait pas de revenir en arrière après avoir goûté au 100 % distanciel. « Ça m’a changé la vie. Je suis beaucoup moins fatigué et je gère mon temps comme je le veux », argumente-t-il, reprenant un ton sérieux. À tel point qu’il était prêt à quitter son emploi s’il n’obtenait pas gain de cause. « Je ne me voyais plus faire 100 km par jour aller-retour pour aller au boulot. Le télétravail, ça m’a motivé à rester dans la boîte plutôt qu’à changer. » 

Ali n’est pas un cas isolé. Comme lui, Gaïd, une Rennaise employée comme data consultante pour une entreprise parisienne, Pierre Jacquot, habitant de Tours mais ingénieur informaticien pour la société de prestation Conserto à Rennes, ou Stéphanie*, experte-comptable pour un cabinet d’Île-de-France, désormais résidante dans le Finistère, ont obtenu du distanciel complet. Sans quoi, ils auraient quitté leur emploi.

« Le fait que des personnes aient été convaincues de rester en poste grâce au télétravail est une réalité tangible », juge Marianne Le Gagneur, doctorante en sociologie à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris. Spécialisée dans la question des outils numériques mobiles, elle étudie actuellement le travail à distance. « Cette pratique est devenue un argument pour rester dans un emploi à un moment donné, parce qu’elle permet de concilier les différentes aspirations des travailleurs. »

Pierre Jacquot a ainsi pu allier volonté personnelle et épanouissement professionnel. L’ingénieur informaticien de 30 ans, alors en poste à Rennes, avait comme projet de déménager à Tours (Indre-et-Loire) pour y rejoindre ses parents et sa sœur, tout en se rapprochant de la famille de sa compagne. Anticipant un potentiel refus de son entreprise, il avait commencé à prospecter dans son futur département. Finalement, il n’a pas eu à beaucoup insister pour que sa demande de distanciel complet soit acceptée par son entreprise mère et par le client pour lequel il effectue ses missions.

« Les négociations ont été assez faciles, je pensais que ça allait être bien plus compliqué. J’avais peur que mes chefs me disent non parce qu’ils ne pouvaient pas faire de business à Tours. Mais visiblement, il peut y avoir des opportunités. » Devoir quitter « cette boîte où [ses] collègues et [sa] mission sont top » l’aurait attristé. Toutefois, il n’était pas inquiet à l’idée de devoir rebondir. « Actuellement, ce n’est pas un problème de trouver des jobs dans mon domaine. On est contacté de partout en France à cause des pénuries de candidats. »

Les besoins en main d’œuvre des entreprises de l’ingénierie informatique sont, en effet, importants. En Bretagne, 83 % des projets de recrutement de cadres y sont jugés difficiles, contre 67 % sur le territoire national selon une enquête réalisée en 2022 par l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). « Le manager de mon client m’a dit que si je partais, comme j’avais deux ans d’expérience, ça allait être vraiment pénible pour me remplacer », expose Pierre Jacquot.

Toujours selon l’Apec, 79 % des décideurs qui prévoient de recruter des cadres au premier trimestre 2023, tous secteurs confondus, s’attendent à des difficultés. Dans ce contexte, ils sont prêts à quelques concessions. « En ce moment, il y a peu de chômage et des pénuries dans beaucoup de métiers. Les salariés sont donc en position de force pour augmenter leur niveau d’exigence, constate Jean-Édouard Grésy, négociateur et médiateur auprès d’entreprises pour le cabinet parisien de conseil, de formation et de recherche AlterNego. Ça commence souvent par une augmentation de la rémunération et ensuite des conditions de travail, dont fait partie le télétravail. »

Ce mouvement s’inscrit dans une dynamique plus large de développement du distanciel depuis la pandémie du Covid-19. L’expérience imposée de cette pratique durant les confinements successifs est venue atténuer les réticences que pouvaient émettre employeurs et managers quant au travail fourni par leurs salariés à la maison. « Avec mes collègues, on était légitimes à demander plus de jours parce qu’on avait prouvé qu’on était capables de bien bosser à distance », avance Ali Mechkouri, entouré de ses chats.

Dès lors, de nombreuses organisations ont décidé d’intégrer ce mode de travail dans leur fonctionnement : 4 070 accords d’entreprise portant sur cette pratique ont été signés dans l’hexagone en 2021, soit dix fois plus qu’en 2017, comme l’indiquent les chiffres de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares). Selon la chercheuse Marianne Le Gagneur, la multiplication des accords doit être analysée « comme une reprise du contrôle des entreprises sur l’encadrement du télétravail mais aussi comme un accès plus large à ce mode d’organisation pour de nombreux salariés ».

Malgré tout, l’exercice du télétravail reste marqué par une double division, comme le note l’universitaire. La première inégalité persistante est d’abord horizontale. Cela signifie que tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Sur l’année 2021, près d’un salarié sur deux (47 %) exerçait une profession où le travail à distance n’était pas organisé. Cela comprenait notamment les métiers de l’industrie, de la santé, de l’action sociale, du commerce et de l’hébergement-restauration, d’après l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). « Le télétravail est surtout mis en place dans le secteur tertiaire, et notamment dans les domaines de l’information et de la communication, de la banque, des finances et des assurances », rajoute Marianne Le Gagneur.

La seconde inégalité est verticale et concerne les catégories socio-professionnelles. Malgré sa démocratisation, le travail à distance « reste un phénomène de cadres encore aujourd’hui. Sa morphologie n’a pas changé à l’issue de la crise sanitaire », analyse la doctorante. En témoigne l’étude de l’Insee sur le marché du travail en 2022 : ce dispositif est pratiqué par 52,2 % des cadres, pour qui l’autonomie est de facto une qualité reconnue, 19,4 % des professions intermédiaires, 8,5 % des employés et 0,2 % des ouvriers.

Selon la même enquête, parmi tous ces télétravailleurs, un tiers exerçait trois jours ou plus par semaine à domicile. Chez les cadres, en octobre 2021, ils étaient 11 % à évoluer, comme Gaïd, Pierre et Ali, à temps plein en distanciel, à l’exception d’un ou deux jours par mois.

Au-delà de la flexibilité, la diminution de la fatigue et l’amélioration du bien-être sont aussi régulièrement avancées par les principaux concernés. « Je ne pourrais pas repasser à un présentiel complet aujourd’hui, ça m’userait trop », indique la data consultante Gaïd. Après plusieurs années à Paris, la jeune femme a profité des confinements pour revenir s’installer en Bretagne. Elle a élu domicile à Rennes en juin 2021, dans un immeuble flambant neuf du quartier Sud-Gare, avant même d’avoir l’aval de son employeur pour basculer complètement hors du bureau.

« J’ai essayé tout l’été de négocier le télétravail complet. En septembre 2021, je ne leur ai plus laissé le choix. Ils n’ont pas voulu signer une rupture conventionnelle donc je leur ai dit que j’étais prête à aller jusqu’à l’abandon de poste », retrace-t-elle, dans l’intimité de son appartement.

En legging noir et pull beige, le chignon savamment décoiffé, la consultante de 29 ans explique l’articulation qu’elle a mise en place chez elle pour séparer temps professionnel et personnel. Elle a créé une frontière claire des espaces, même si elle n’a qu’une pièce de vie. « Je ne m’assois jamais à mon bureau en dehors des heures de travail. Si j’ai des affaires personnelles à gérer sur mon ordinateur, je m’installe sur la table à manger. Je suis incapable d’aller dans ce coin le week-end », rigole-t-elle en désignant son espace “pro”. Ce dernier est cantonné dans un coin du T2, séparé du reste par un gros canapé bleu.

Ce fonctionnement lui a été dicté par son expérience durant les confinements, où elle « a fait pas mal d’erreurs ». Alors que, comme elle, de nombreuses personnes ont été forcées de travailler à distance pendant la crise sanitaire, c’est devenu une pratique choisie par 68 % des salariés du secteur privé, selon le baromètre « Télétravail et organisations hybrides 2022 » de Malakoff Humanis, un groupe de protection sociale paritaire et mutualiste à but non-lucratif.

Si Pierre, Ali ou encore Gaïd sont parvenus à négocier autant de télétravail, c’est que leurs patrons respectifs y trouvaient leur compte : « D’une certaine manière, ça arrange un peu tout le monde », confirme Ali Mechkouri. « Avec la crise sanitaire, les entreprises se sont rendu compte que les gens font de plus longues journées de travail quand ils sont chez eux », renchérit la chercheuse en sciences sociales, Marianne Le Gagneur.

Directeur des ressources humaines chez Orange Grand Ouest, Laurent Kerléo liste les avantages de cette pratique : « Cela contribue et a contribué très largement à l’amélioration de la performance économique et sociale de l’entreprise, à une meilleure productivité en général des salariés. Quand on travaille à distance, il n’y a plus à effectuer le trajet pour aller au bureau et souvent, l’environnement est plus serein, il y a moins de dérangements. »

Le laboratoire qu’a constitué la crise sanitaire a infirmé les craintes sur le désengagement. « Je ne commence pas plus tôt ou plus tard mais il y a moins de distraction, pas de pause avec les collègues donc je suis plus concentré et plus productif, convient Pierre Jacquot, ingénieur informaticien en télétravail complet. Sur des sujets où j’ai besoin d’une grande concentration, c’est plus facile d’être dans sa bulle sans être interrompu. »

Les bénéfices semblent tout aussi importants pour les entreprises. Dorénavant, certaines s’appuient sur cet argument pour le recrutement. C’est même presque indispensable dans les secteurs concurrentiels. « Si une direction n’est pas favorable au télétravail, alors que rien ne s’y oppose, elle aura beaucoup de mal à recruter », estime Matthieu Trubert, ingénieur et membre du comité scientifique de l’Observatoire du télétravail, lancé en décembre 2022 par l’Ugict-CGT.

Même son de cloche dans les services de ressources humaines : « C’est clairement un facteur d’attractivité pour aller chercher des talents à l’extérieur », atteste Laurent Kerléo, DRH de la région Grand Ouest chez Orange. Cela permet d’étendre le périmètre géographique de recrutement, comme le rapporte Maëlle Valery-Radot, chargée de recrutement à Claranet, entreprise de gestion informatique basée à Cesson-Sévigné (Ille-et-Vilaine) : « Lorsqu’on publie une offre, on la diffuse partout en France. »

Claranet, spécialisée dans la gestion informatique, le cloud et la cybersécurité, propose depuis novembre 2021 de l’ hybrid working. Autrement dit, du télétravail à la carte. Entre zéro et cinq jours à distance, à chacun de choisir le rythme qui lui convient d’une semaine à l’autre : « La seule contrainte, c’est de venir sur place si le manager instaure un ‘rite’, c’est-à-dire une réunion d’équipe régulière. Cela peut être une fois par semaine, une fois toutes les deux semaines ou une fois par mois, cela dépend des équipes », détaille Maëlle Valery-Radot, du service RH.

Jean-Emmanuel Faure y est manager depuis deux ans. Ce trentenaire aux petites lunettes rondes s’y épanouit : « C’est mon premier poste en tant que responsable. Quand je suis arrivé, avec le télétravail, je me suis dit que ça allait être un challenge. Mais ça s’est très bien passé car il y a cette culture du distanciel qui responsabilise les gens et les ‘rites’ qui permettent de se voir régulièrement. » Pouvoir travailler de son domicile n’était pas forcément une condition pour lui avant d’arriver à Claranet, mais aujourd’hui, il y serait beaucoup plus attentif : « L’hybrid working permet une vraie flexibilité, c’est une chance de pouvoir s’adapter. »

D’ailleurs, les locaux sont aménagés en flex office. Un principe : personne n’a de bureau fixe. Les larges open space, peu remplis, côtoient les multiples salles de réunion, les petites cabines pour passer un coup de téléphone ou encore les espaces de repos : banquettes, baby-foot ou toboggan. En arrivant le matin, les collaborateurs passent généralement par l’immense cafétéria du rez-de-chaussée, où chacun peut se faire un expresso, prendre un croissant et discuter avec ses collègues à table ou installés sur l’un des nombreux canapés. Puis, après avoir récupéré ses affaires dans un casier, le salarié travaille de la place qu’il a choisie : « L’humain est au cœur du dispositif, l’idée n’est pas de faire des économies sur la surface des locaux. Il y a de la place si jamais tout le monde veut venir en présentiel », affirme Jean-Emmanuel Faure, le jeune manager.

Chez Orange aussi, l’accroissement du télétravail s’est accompagné d’une réorganisation spatiale, assimilable au flex office : « Garder un bureau par personne, c’est une perte sèche économique. On réfléchit différemment à notre parc immobilier, en créant ce qu’on appelle des environnements dynamiques », présente le DRH Laurent Kerléo.

À la CGT, la représentante du personnel et déléguée syndicale est moins enthousiaste. « Il y a désormais moins de places que de salariés sur les différents sites, s’inquiète Sandrine Ville. En matière de conditions de travail, c’est une régression. Les employés n’ont pas leur bureau avec leurs affaires. Ils ne savent pas s’ils vont trouver une place en arrivant le matin, ce qui peut engendrer pas mal de stress… On a fait une demande pour qu’au moins les personnes qui ne télétravaillent pas aient leur propre bureau. Mais la direction a refusé », déplore-t-elle. Le directeur des ressources humaines justifie cette position :  » Puisqu’on a aujourd’hui un taux de fréquentation de l’ordre de 50 %, la logique n’est pas de promouvoir un poste de télétravail par personne. »

La règle de base du télétravail est le “double-volontariat” : un employeur ne peut pas imposer cette organisation à un employé et inversement. Mais le flex office poussé à l’extrême incite fortement certains salariés à pratiquer le travail à distance, par crainte de ne pas trouver de bureau.
Corinne Jarnot est cadre chez Orange, à Rennes, depuis plusieurs années. Cette représentante du personnel de la CGT confirme la réorganisation des espaces de travail : « Ce n’est pas forcément appelé flex office, mais ça se développe sur les différents sites. Grâce à cela, ils ferment des bâtiments. Ils les revendent ou arrêtent la location. On aimerait bien pouvoir profiter de ces économies… »

Ce qui s’observe dans le secteur de l’informatique et des télécommunications se constate aussi dans d’autres domaines. « Développer le télétravail, c’était une volonté du groupe, témoigne Laurent Valy, secrétaire du Conseil social et économique (CSE) de PSA, entité du groupe automobile Stellantis, à Rennes et secrétaire général de la CFDT métallurgie en Ille-et-Vilaine. Pendant le Covid, les dirigeants ont constaté que ça pouvait fonctionner. En plus, il fallait réduire des surfaces tertiaires à Paris, Poissy (Yvelines), Vélizy (Yvelines), car là-bas, les mètres carrés coûtent cher. Il y avait vraiment un projet économique derrière. »

Entre plus grande productivité et réduction des frais, les entreprises semblent avoir tout à y gagner. Mais dans les faits, toutes ne facilitent pas le télétravail. Dans les secteurs qui n’ont pas de difficulté à recruter, les accords internes manquent considérablement de souplesse, comme le fait remarquer Jean-Edouard Grésy du cabinet parisien de conseil AlterNego.
Contrairement aux développeurs, aux informaticiens ou aux ingénieurs, qui bénéficieraient d’ « une permissivité extrême » de la part d’entreprises qui opèrent une « chasse aux talents », les salariés de « la grande majorité des boîtes qui pratiquent le télétravail » sont bien plus contraints. « Beaucoup de sociétés ne vont pas au-delà de deux jours par semaine. Et puis certaines directions décréteront qu’ils ne peuvent être posés tel ou tel jour », observe le médiateur.

Dans le cas d’Orange, « on peut aller jusqu’à trois jours par semaine, mais il y a beaucoup de services qui limitent à deux jours », explique Corinne Jarnot, représentante du personnel de la CGT dans la société de télécommunications. « Quand on demande pourquoi, car des employés aimeraient bien avoir ces trois jours, la direction ne justifie même pas. Elle nous dit : ‘Dans cette entité, c’est comme ça.’ Il n’y a pas de dialogue », dénonce-t-elle. Le DRH, Laurent Kerléo, défend la posture managériale : « Pour les entités opérationnelles, je ne suis pas surpris que les responsables aient des réticences à passer à la formule des trois jours. Si on ajoute les congés payés et les absences ponctuelles à l’équation, le risque, pour ces personnes qui sont majoritairement en dehors des locaux, est la désinsertion professionnelle ou l’éloignement des collectifs de travail. »

À l’inverse, à PSA, dans l’administratif ou la recherche et le développement, « les salariés ont été fortement incités au travail à distance », retrace Laurent Valy, délégué syndical CFDT sur le site de Rennes-La Janais.  « Le directeur voulait quatre, voire cinq jours, car il estime que c’est l’avenir, qu’il faut à tout prix aller là-dessus. Mais nous, on ne voulait pas aller au-delà des trois jours par semaine », déplore le syndicaliste. Avec ses collègues, ils n’ont pas eu gain de cause. Contactée, la direction n’a pas répondu à nos sollicitations.

Plusieurs formes de télétravail coexistent au sein du groupe automobile. Hebdomadaire, avec un à trois jours par semaine, ou bien mensuelle, offrant la possibilité de poser jusqu’à cinq jours par semaine, après concertation avec le manager. La limite des trois jours peut ainsi être aisément dépassée. De manière générale, selon Laurent Valy, « on n’est pas sur de la co-décision comme en Allemagne. Les directions ont quand même bien la main, surtout dans des grands groupes comme PSA ».

Le cadre de référence pour la mise en place du télétravail laisse une marge considérable à l’employeur. Conclu par différentes organisations syndicales (CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO côté salariés et CPME, Medef et U2P côté employeurs), l’Accord national interprofessionnel du 26 novembre 2020, ou l’Ani, fait office de mode d’emploi pour les entreprises qui cherchent à encadrer le travail à distance. Un arrêté de 2021 impose aux sociétés de formaliser les conditions d’organisation du télétravail. Rien ne les oblige cependant à reprendre l’intégralité de l’Ani, qui ne crée aucune contrainte légale. Cette flexibilité est nécessaire selon les avocats Camille Delahaye et Simon Briaud, intervenant en droit du travail à Rennes, pour tenir compte des activités spécifiques des organisations : « Établir des règles très strictes qui s’imposeraient à tous et qui prévaudraient sur les accords internes empêcherait toute modulation ou adaptation » et ne serait, in fine, pas viable.

« L’Ani agit comme un grand entonnoir qui doit normalement être précisé à l’échelle interne », image Maître Delahaye. Mais comme en rendait compte Nicole Maggi-Germain, à la tête de l’Institut des sciences sociales du travail (ISST) à l’université Paris-Sorbonne, dans un entretien publié en février 2021 par l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), « il prévoit peu de dispositions contraignantes […]. Avec des formules comme ‘il convient d’être attentif’, ‘une vigilance particulière doit être portée…’, on sort du champ du droit ‘dur’ pour glisser vers la norme managériale ».

En se rapportant à l’Ani et aux trois autres articles intégrés dans le Code du travail qui font mention du travail à distance, Matthieu Trubert, délégué syndical de la CGT-Microsoft et membre du comité scientifique de l’Observatoire du télétravail, complète : « Ce sont des textes qui sont plus des pétitions de principe, des textes prescriptifs et normatifs. » La mise en place du travail à distance « est un exercice consciencieux pour les entreprises car ça demande du temps, des ressources humaines. Elles peuvent ne pas avoir les moyens ou ne pas vouloir mettre les moyens, et certaines n’hésitent pas à improviser ».

L’Ani a fait du travail à distance un véritable sujet de dialogue au sein des sociétés. Plusieurs types d’accords peuvent désormais être négociés en interne. Celui qui doit être privilégié (étant le plus protecteur pour le salarié), et même en l’absence de délégué syndical, est l’accord collectif. Il pose notamment les critères d’éligibilité pour l’ensemble des salariés, clarifie ses conditions d’application et se solde par un avenant au contrat de travail.

En l’absence de représentants syndicaux, l’employeur peut également avoir recours à une charte qui sera soumise pour avis au CSE, le Comité social et économique de l’entreprise, lorsqu’il existe. Cette charte s’applique aussi à définir les conditions d’organisation du télétravail, mais « il s’agit ici d’une décision unilatérale de l’employeur », précise Matthieu Trubert de l’Observatoire du télétravail. Il continue : « La direction peut donc revenir dessus alors que, pour les accords d’entreprise, il faut qu’il y ait une dénonciation pour repartir sur une négociation. » Toutefois, le recours à la charte reste à la marge.

Enfin, un employé et son chef d’entreprise peuvent passer un accord individuel. Les organisations signataires de l’Accord national interprofessionnel sur le télétravail soulignent l’importance, dans ce cas, de recourir à un écrit (article 2.3.2) qui informe le salarié « des conditions de mobilisation et de mise en œuvre de cette forme de travail ». Cela peut notamment porter sur sa pratique, les modalités d’évaluation de la charge de travail ou l’articulation entre télétravail et présentiel. Mais comme l’accord interprofessionnel n’est que très peu contraignant, la pratique peut différer de ses « recommandations ». Maître Simon Briaud intervient notamment lorsqu’aucune règle n’a été fixée en amont. « C’est là où le danger réside », alerte l’avocat rennais.

Malgré tout, lorsque ce mode d’organisation est à l’initiative des salariés (et notamment lorsqu’il s’agit de se mettre en 100 % télétravail), il se négocie bien souvent de manière informelle. Questionnée sur l’accord conclu avec son employeur, Stéphanie, l’experte-comptable parisienne qui a débarqué sur la côte finistérienne, se pince les lèvres en souriant et secoue la tête. Comme Gaïd, la data consultante, elle n’a pas obtenu une quelconque formalisation par écrit. Quant à Ali, le consultant en assurance, il n’a toujours pas d’avenant.

Puisque le télétravail ne leur est pas officiellement autorisé, certains salariés comme Gaïd craignent qu’il soit remis en cause. Sa situation n’est mentionnée que dans son rapport semestriel d’évaluation, réalisé et signé avec son supérieur. Le problème, c’est que ce dernier vient de quitter l’entreprise. Légitimement, elle s’interroge sur la possibilité de poursuivre en distanciel : « Les conséquences sont aujourd’hui difficiles à prévoir, puisque personne n’est au courant que je n’ai pas obtenu d’accord écrit sur le sujet… »

L’air soucieux, Corinne Jarnot, représentante du personnel chez Orange, évoque un cas similaire : « La salariée avait demandé à sa DRH s’il était possible d’en discuter, d’officialiser le fait qu’elle venait moins de deux jours toutes les deux semaines. Mais sa responsable n’a rien voulu savoir. Il doit y avoir pas mal de cas comme ça et on n’est pas au courant. La direction se garde bien d’en parler. » Laurent Kerléo, le DRH, assure ne pas avoir connaissance de tous les cas individuels. Il signale néanmoins que l’accord collectif d’Orange ne permet pas de contractualiser une situation qui dépasserait les trois jours de télétravail par semaine. 

Partant de l’idée que le salarié est gagnant en obtenant du télétravail, les chefs d’entreprise jouent parfois sur des glissements dans l’application de ces accords individuels qui se rapprochent du tacite. Les employés, quant à eux, se sentent redevables auprès de leur direction. « J’ai conscience d’être bien lotie, mon travail me permet cet environnement privilégié », confie Stéphanie, reconnaissante.

À deux pas de la mer et à des centaines de kilomètres des embouteillages de la capitale, elle ne changerait sa situation pour rien au monde. Parfois, son employeur ne se prive pas de le lui rappeler : « Tu fais chier aussi, tu n’es pas sur Paris ! » Lors des négociations, Gaïd s’est, elle aussi, sentie culpabilisée : « Ma direction m’a rabâché que j’avais un salaire parisien alors que j’habite à Rennes. Pourtant, il dépend de ce que je produis dans le cadre de mes missions… »

Les heures d’Ali, qui sont comptées en forfait jour, ne sont pas formalisées sur son contrat, et il lui arrive de travailler à l’excès. « Dans les faits, tu bosses plutôt quatorze heures que cinq heures… C’est problématique mais après, j’ai le salaire (autour de 3 000 € par mois), le statut et la liberté qui vont avec. Comme je n’ai toujours pas signé d’avenant, ça doit laisser la place à une certaine interprétation… » Un suivi particulier pour ce type de contrat est recommandé par l’Aract, l’Agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail, qui dépend du ministère du Travail. Ce n’est pas le cas pour Ali, mais il considère cela comme un problème mineur. Il ne reviendra jamais en arrière.

Au-delà de la différence de traitement entre les accords possibles au sein de l’entreprise, cette forme d’organisation peut s’accompagner d’horaires atypiques. L’employeur a l’obligation de contrôler le temps de travail de ses salariés, mais les dispositions légales et conventionnelles n’en précisent pas les modalités. « Le droit à la déconnexion et le contrôle effectif des employeurs sur le temps de travail sont les deux grands absents » des accords en lien avec le télétravail, dénoncent Maître Delahaye et Maître Briaud, qui représentent majoritairement les salariés en cas de litige. La plupart des dossiers traités par ces avocats portent sur ces questions. Dans les faits, « c’est à l’employeur de faire d’autant plus attention, complète Maître Briaud. Il en va de sa responsabilité de préserver la santé et la sécurité de son employé lorsqu’il est en fonction », qu’il soit ou non en télétravail.

Pourtant, toutes les études se rejoignent sur ce que met en évidence Matthieu Trubert, de l’Observatoire du télétravail : « Une charge de travail et une amplitude horaire qui augmentent. En télétravail, il n’y a pas de temps mort. » Lorsque Laurent Kerléo, directeur des ressources humaines chez Orange pour la région Grand Ouest, est interrogé sur ce point, il assure être vigilant en matière de prévention des risques. Il dit veiller également à la surcharge au travail lors du renouvellement de l’avenant, chaque année ou tous les deux ans. Dans l’accord collectif, l’évaluation des risques n’est que brièvement évoquée et aucune situation concrète n’est mentionnée. Selon le DRH d’Orange, « il n’y a pas d’accentuation de ce type de signalement de la part des télétravailleurs »

En 100 % distanciel, Stéphanie, l’experte-comptable finistérienne, témoigne, pour sa part, de situations parfois complexes : « Il m’est déjà arrivé d’être malade comme un chien mais comme j’étais en plein reporting (activité de synthèse de la situation financière d’une société) , je ne pouvais pas me mettre en arrêt. »
Puisqu’elle n’a signé aucun contrat avec son employeur, rien n’est mis en place avec lui sur la question d’évaluation des risques. « Je gère de manière autonome pour ne pas me retrouver en surcharge de travail. Si tu n’es pas vigilante sur la déconnexion, t’es foutue. » Mais quid des employés qui n’en sont pas capables ? Stéphanie ne parlera jamais à son chef des douleurs physiques qu’elle ressent, liées au manque d’exercice qu’elle avait l’habitude d’effectuer auparavant. Pour les accidents du travail, elle estime que sa propre responsabilité civile est engagée.

Pourtant, le Code du travail prévoit désormais qu’un accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail, pendant l’activité professionnelle du salarié, est considéré comme un accident du travail. Ali en a conscience mais, dans les faits, «  s’il y a un problème, je ne sais pas comment ça se passe « , interroge-t-il, pensif. Selon Maître Briaud, cet élément peut créer des contentieux car «  l’employeur a le droit d’émettre des réserves ou de le contester « . 

Autre subtilité constatée depuis la généralisation des formes de distanciel, « certains, au lieu de se mettre en arrêt maladie, décident maintenant de se mettre en télétravail, observe, Fabrice Le Goff, un militant de la CGT, cadre à La Poste. Il serait intéressant d’étudier si le nombre d’arrêts n’a pas diminué depuis cette nouvelle forme d’organisation… » Illustration avec Jade*, employée chez Orange, qui n’est normalement pas éligible au travail à distance : elle a pu se mettre en télétravail il y a peu, après avoir informé sa direction qu’elle se sentait trop malade pour venir sur place. Dans la société de télécommunications, du télétravail occasionnel, qui ne nécessite pas d’avenant, est également possible. Ce dernier peut alors être utilisé, à l’appréciation du manager, pour une circonstance exceptionnelle, comme le clarifie Laurent Kerléo.

Au bon vouloir des employeurs

Depuis les ordonnances Macron de 2018, si le télétravail est mis en place à la demande du salarié, il est possible pour l’employeur de refuser toute prise en charge des frais liés à ce mode d’organisation. «  Il demeure néanmoins le principe général énoncé par la jurisprudence de la Cour de cassation (1.998), selon lequel les frais professionnels sont à la charge de l’entreprise , sous réserve qu’ils soient justifiés par la réalité des dépenses du salarié « , rapporte le manuel de mise en place du télétravail élaboré par le cabinet Barthélémy Avocats.

Marianne Le Gagneur, doctorante en sociologie et spécialiste du travail à distance, a souvent constaté des points de tension sur la question financière. «  Il va de soi que l’employeur doit fournir les outils pour la bonne conduite du travail à la maison mais en pratique, ce n’est pas toujours le cas. Et puis ça coûte davantage de chauffage, d’internet aux personnes. Mais tout ça ne se négocie pas facilement. »

Pour Ali, par exemple, le consultant en assurances de Rennes, ce point n’a pas été abordé.  » J’imagine, en effet, que mes dépenses domestiques ont augmenté, mais elles sont largement compensées par les frais d’essence que je n’ai plus à assurer. » Gaïd, qui s’est vu reprocher par son employeur son salaire parisien en habitant à Rennes, confirme qu’il ne prend à sa charge aucun défraiement. «  Lorsque je dois remonter sur Paris, on ne me rembourse pas non plus mes allers et retours.  » En ce moment, sa direction insiste pour la faire revenir plus souvent sur site mais, à chaque fois qu’elle pose la condition d’être indemnisée, «  elle ne veut rien savoir et coupe nette la conversation « . 

Lorsque Stéphanie a souhaité résider en Bretagne, son chef lui a répondu : «  D’accord mais je ne finance rien, même lorsque tu devras monter à Paris. Aucun matériel, aucun frais. C’est ton choix . » Concernant les indemnités liées directement au travail à distance, elle souligne : «  Je ne me vois pas lui demander quoi que ce soit. Je ne me sens pas en négociation contre lui. Dans tous les cas, ça équivaudrait à quarante euros par mois, ce que me coûtait mon Pass Navigo quand j’habitais en Île-de-France. « 

«  Les entreprises se sont mises en position de dire aux employés : retournez chez vous et on ne vous chauffera pas à nos frais « , dénonce Matthieu Trubert de l’Observatoire du télétravail. Or, «  il ne doit pas y avoir d’inégalités entre les salariés en présentiel et ceux en distanciel, c’est d’ailleurs pour ça qu’il faut que les frais soient pris en charge « , rappelle l’avocate rennaise Camille Delahaye. L’article L1222-9 du Code du travail, qui porte sur la mise en place du télétravail par les entreprises, dispose que «  le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise « .

Chez PSA, selon Laurent Valy, délégué syndical CFDT du site rennais : «  La direction s’en tient au strict minimum, soit dix euros par mois. Que ce soit les frais de chauffage, l’assurance, tous ces détails cumulés représentent pourtant un coût important. Selon eux, le télétravail, c’est déjà un gain de temps, un gain au niveau de l’essence ou des transports. Les avantages sont déjà là.  » La direction n’a pas souhaité réagir sur ce point-là. Comme cette organisation du travail a été mise en place à sa demande, l’entreprise a «  l’obligation légale de prendre en charge les coûts engendrés par le télétravail à hauteur de ce qu’ils représentent « , rappelle Matthieu Lebas, avocat rennais du cabinet Barthélémy, spécialisé dans le conseil d’entreprises en droit social. «  Les directions ne veulent pas participer aux frais. C’est vraiment le sujet de crispation, ce qui va coincer dans toutes les boîtes « , ajoute le représentant de la CFDT.

Chez Orange, Sandrine Ville, déléguée CGT, précise que l’indemnité est fixée à 180 euros par an, «  ce qui est très peu , déplore-t-elle. Ce n’était pas possible de faire plus du côté de la direction. Son argument principal était qu’ils n’avaient pas le budget pour ça « . En allant voir du côté du tableau d’évaluation des frais engendrés par le salarié en télétravail, désormais intégré dans le site du Bulletin officiel de sécurité sociale (Boss), l’ Union de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) préconise deux types d’indemnités : 2,5 euros par jour de travail à distance dans la limite de 55 euros par mois ou 10 euros par mois lorsque le salarié pose un jour par semaine, 20 euros lorsqu’il s’agit de deux jours par semaine, etc. On est donc souvent loin du compte…

Interrogés sur la question du défraiement, Claranet et Orange ont pointé l’enveloppe inflation accordée aux salaires les plus modestes, qui a pour but de participer aux frais d’électricité. «  La question du pouvoir d’achat a été vue sur d’autres dispositifs « , souligne Laurent Kerléo, DRH dans la société de télécommunications. Le sujet était au cœur des négociations de 2022 qui n’ont pas abouti. «  En tout état de cause, Orange est au-dessus de la moyenne des autres entreprises concernant les indemnités. On est très loin d’être mal placés « , garantit-il.

Pour le moment, les contentieux restent plutôt rares. Dans la salle de réunion du cabinet rennais MDL Avocats, Maître Delahaye, reculée sur sa chaise, réfléchit quelques instants avant de conclure : «  Le télétravail ne crée pas, en l’état, tant de litiges que ça. Je pense que les gens ne s’en plaignent pas. Tout le monde y trouve son compte. Pour l’instant… »

* Les prénoms ont été modifiés.

Roxanne Machecourt, Enora Nicolas, Léna Guihéneuf

Les propos et informations contenus dans cet article ont été recueillis entre novembre 2022 et avril 2023.

Il s’appuie sur une importante documentation : textes de loi, accord national interprofessionnel (Ani), accords d’entreprises… Des échanges avec des avocats rennais, Matthieu Lebas du cabinet Barthélémy et Camille Delahaye et Simon Briaud de MDL Avocats, nous ont permis de mieux appréhender le cadre législatif du télétravail.

Nous nous sommes déplacées chez Ali et Gaïd, qui vivent tous deux à Rennes, et dans le Finistère chez Stéphanie, qui a souhaité rester anonyme. Pierre a quant à lui été interviewé par téléphone.

Les entretiens des trois experts (Marianne Le Gagneur, Jean-Edouard Grésy et Matthieu Trubert) ont été réalisés par téléphone.

Concernant les syndicalistes : pour la CGT, nous avons rencontré Corinne Jarnot et Fabrice Le Goff et nous avons eu par téléphone Sandrine Ville. Pour la CFDT, nous avons échangé avec Laurent Valy en visio-conférence. 

Nous nous sommes entretenues avec Maëlle Vallery-Radot par visio-conférence avant de nous déplacer dans les locaux de Claranet à Cesson-Sévigné pour rencontrer Jean-Emmanuel Faure.

Enfin, nous avons interviewé Laurent Kerléo par téléphone à deux reprises en présence d’une attachée de presse de la société. Le site PSA La Janais, entité de groupe de Stellantis, n’a pas souhaité répondre à nos sollicitations.

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