Rejoindre l’antre de pierre de Colette Trublet permet de traverser les époques. L’énorme bâtisse de la petite cité de caractère de Bécherel (Ille-et-Vilaine), une ancienne usine de sabots, se trouve au milieu du village. Colette l’a acquise, voilà quelques dizaines d’années, pour une bouchée de pain. « Mais tout était à refaire », retrace-t-elle, « là, on était dans l’atelier de fabrication des sabots ».
Après avoir passé de multiples portes d’un autre âge, longé un couloir sombre et monté les marches d’un perron, nous voici chez l’octogénaire. Si les signes du temps qui passe apparaissent au détour d’une canne ou d’un discret appareil auditif, Colette Trublet nous entraîne dans un bouillonnement de mots et d’ardeur qui ne correspondent guère à ses 89 printemps.
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Car la dame n’a pas qu’un passé, elle a aussi un avenir qu’elle étale devant nous comme des trophées. Plusieurs livres, dont le dernier, tout juste imprimé, qu’elle a coécrit avec un « collègue » éducateur spécialisé.
Née à Lanvallay dans les années 30
Depuis sa naissance à Lanvallay (Côtes-d’Armor) dans les années 30, Colette Trublet n’a cessé de travailler. Peut-être parce qu’elle a commencé très tôt l’école.
Je suis entrée au CP à 4 ans 1/2, à la mort de mon père. A l’époque, il n’y avait pas d’école maternelle mais comme ma mère était veuve et qu’elle avait besoin de travailler pour nous faire vivre, j’ai dû aller à l’école.
L’école, ce sera celle du village, à Lanvallay. Puis le lycée de filles, rue Broussais, à Dinan, où elle passe un premier bac « maths », et un second à Roger-Vercel, « Philo ».
Repérée par l’une de ses professeures qui lui conseille de devenir éducatrice spécialisée, Colette l’écoute et part en région parisienne pour se former.
L’envie irrépressible de revenir en Bretagne
Elle revient pourtant bien vite dans ses pénates bretonnes et se marie avec un militaire. Le couple part alors au Maroc quelques années avant de revenir en France. Trois enfants naissent puis Colette et son mari décident de se séparer.
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La jeune femme d’alors continue d’explorer les différentes facettes de son métier. On lui propose un poste de formatrice à l’université de Lille (Nord), qu’elle accepte, et embarque ses trois enfants. « Je ne connaissais personne là-bas, on vivait en banlieue, c’était assez triste… »
Ensuite, direction Amiens (Somme), pour quelques années avant que n’arrive « une envie irrépressible de revenir en Bretagne ». Ce qu’elle fera fin 70. En parallèle Colette avance professionnellement et crée un cabinet de psychanalyste.
Créer un lieu ouvert pour vivre autrement
Ce retour tombera en plein renouveau de la culture bretonne. Colette apprend le breton, suit de nombreux artistes, Servat, Kemener, Glen Mor ou encore Myrdhin avec une bande de copains qui rêvent d’allier épanouissement personnel et culturel.
On avait aussi tous des enfants qui avaient besoin d’être embarqués dans un projet et on voulait élaborer un concept pour créer un lieu ouvert pour pouvoir vivre autrement, d’une façon plus créative.
Un coup d’œil vers la mer et ses prix, déjà trop élevés, et le petit groupe se tournera vite vers Bécherel, là où le fils de Colette a déjà acheté une petite maison pas chère pour monter une librairie-brocante.
« Quatre maisons sur cinq étaient vides à l’époque dans le bourg. Je trouvais le village joli et il y avait beaucoup de potentiel pour le faire revivre. »
Colette achète sa grosse maison en 1985 et continue son cabinet à Dinan quelque temps.
En retraite, elle monte une crêperie avec son fils, à côté du donjon. « On était dans un désert, la crêperie a démarré au quart de tour. On en a fait un point de départ d’animations culturelles en recevant des chanteurs, auteurs, musiciens. »
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Mais Bécherel restait bien calme, difficile de faire venir les visiteurs en dehors des animations.
L’idée viendra alors d’un ami qui rentre des Ardennes belges, où un journaliste avait créé un village du livre. En 1988, Colette et ses enfants s’y rendent et reviennent conquis.
On a passé trois jours de rêve : 32 librairies pour 300 habitants et une auberge dans la forêt. Cette fois, on tenait notre idée !
1989, première fête du livre
Du rêve à la réalisation, il a fallu une année et la première fête du livre s’est tenue pour Pâques en 1989.
« Et c’était parti. La fête s’est répétée année après année et les libraires ont acheté des maisons peu à peu. On a eu des reportages à la télé et, aujourd’hui, on attire les amateurs de livres rares, d’illustrations, de BD et même de vieux vinyles toute l’année. »
Car tout le village s’est peu à peu réveillé. Boutiques, restaurants, une classe en plus à l’école, même si elle reste tranquille, Bécherel est aujourd’hui une petite cité de caractère dynamique.
Fête du livre les 29,30 et 31 mars
La Fête du livre a été crée en 1989. Cette année, elle se déroule les 29, 30 et 31 mars, pour Pâques, comme à son habitude. Cette fête se déploie dans différents espaces de Bécherel : parcs, places, jardins, ruelle mais aussi dans les librairies et ateliers d’artistes situés dans le centre ancien du village et à la Maison du livre.
Ce festival convivial et familial propose chaque année des découvertes variées afin de toucher un public de tous âges autour de la rencontre d’auteurs, d’artistes et de propositions variées.
On y retrouve un marché du livre d’occasion mais aussi du théâtre, des lectures, une balade botanique, des spectacles, des concerts, des apéros et bien d’autres animations à découvrir sur le site maisondulivredebecherel.fr pour retrouver le programme complet.
Aujourd’hui, le fils de Colette tient toujours une librairie, celle du donjon, un morceau de rempart que Colette a acheté sans le savoir en arrivant à Bécherel.
L’arrivée d’internet et la désormais pression immobilière n’ont pas fait vaciller la barque de la cité du livre qui tient son cap et organise, cette année encore pour Pâques, sa fête.
On garde une clientèle de fond intéressée par le livre et ça n’empêche pas de vendre par correspondance.
« Je vis dans les livres, mais c’est vivant »
Depuis qu’elle est en retraite, Colette Trublet s’est aussi prise de passion pour l’écriture. Des livres professionnels ou poétiques, un texte aussi, en collaboration avec Christian Martin, publié dans la revue annuelle du patrimoine local Le Pays de Dinan.
Une vie de rêve, assure-t-elle, toujours profondément installée au milieu des livres. « Je vis dans les livres mais c’est vivant. Depuis que je suis en retraite, je suis dans une cohérence et une liberté que je n’avais jamais connues. »
Il faut imaginer Bécassine et Isidore heureux est le dernier livre de Colette Trublet, sous-titré Les tribulations de deux acteurs du développement social et culturel, Bécherel, cité du livre, Chartres quartier de Picassiette. Aux éditions L’Harmattan, 23€, sur le site de l’éditeur, en librairie ou… à Bécherel.
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